Laissez-moi vous raconter une histoire aussi incroyable que réelle.
Lorsque j’ai entraîné ma famille dans l’acquisition et la restauration d’un château abandonné, j’ignorais qu’il était encore habité par ses anciens occupants. Si au début les voix, silhouettes, coups dans les murs et manifestations physiques étranges nous laissaient perplexes, nous avons appris à les connaître, à les comprendre et, pour certains, à les craindre.
Mais loin des clichés sur les maisons hantées, les invisibles de Fougeret nous ont surtout fait grandir. Si nous voulions nous en sortir vivants, il fallait ouvrir notre esprit aux esprits du lieu.
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Editions Michel Lafon
Note personnelle : ★ ★ ★ ★ ★
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Oh la la, cette chronique est tellement compliquée à écrire pour moi… Non pas parce que le livre ne m’a pas plu, mais parce qu’au contraire, j’ai tellement adoré ma lecture que d’une part, je ne sais pas par où commencer, et d’autre part, si je m’écoutais, je vous en ferais limite un résumé en 10 pages 🙂
“Ce château avait quelque chose d’intrigant. Je me suis souvenue que, quelques années auparavant, je m’étais interrogée sur ce domaine dont les poivrières en ardoises brillaient de l’autre côté de la rivière. Il m’avait déjà fait signe. Je l’avais alors ignoré. Il venait de se rappeler à moi. “
La plume de Véronique est juste exceptionnelle… tout simplement parce qu’on sent qu’elle écrit avec passion, et avec le coeur, et qu’elle parvient à merveille à nous transmettre ses ressentis, ses émotions, sa passion…
J’ai commencé cette lecture sans me focaliser sur l’aspect strictement paranormal. Car même si cela m’intéressait – on ne va pas se mentir, Fougeret est principalement réputé pour cela – j’avais surtout hâte de voir comment une personne lambda en arrive à vouloir s’offrir un château et le rénover. et pour avoir vu il y a peu un reportage sur les premiers mois de travaux, et le résultat qu’il y a aujourd’hui… je trouve le travail accompli admirable et fascinant, surtout quand on voit tout ce par quoi ils ont dû passer pour en arriver là..
Je trouve également très beau la manière dont François, son conjoint, l’a suivie, contre ses appréhensions du départ (Il n’était pas convaincu par l’achat du château, il était même contre)..
“Je lui ai dit que c’était bon, je voulais signer. François Joseph n’était pas d’accord et m’a dit non. Je ne l’ai pas écouté et j’ai signé un compromis de vente avec une condition suspensive d’obtention de prêt. Nous n’avions pas d’argent, mais je n’y pensais même pas. L’inconscience a une vertu, elle permet à l’irréalisable de se réaliser quand seul le coeur est aux commandes. Je faisais taire mon mental. J’étais bien obligée. Pas d’argent, rien que de l’espoir. Le lieu n’était pas banal. L’atmosphère y était étrange, mais son aspect gommait toutes mes appréhensions.”
Par amour, il a accepté cet achat fou et s’est mis corps et âme dans la rénovation… Pourquoi? “Il faut bien s’en occuper ! Et puis, je fais ça pour toi…” lui a-t-il répondu. Je trouve ça tellement beau comme geste d’amour… (oui, c’est mon côté romantique bien enfoui qui ressort 🙂 ).
Dès les premiers jours, des choses étranges se sont passées. les ressentis de sa fille, ses propres ressentis, une voix émanant de nulle part, une ombre qui se déplace sans mouvement devant elle… Mais même si c’était étrange, si cela lui laissait une drôle d’impression, il en fallait plus pour briser son rêve. Alors oui, tout n’a pas été rose, il y a eu des discussions, du découragement, des mésententes… mais qu’importe.
Véronique était, en parallèle aux travaux, toujours en plein dans sa thèse, et l’un comme l’autre demandaient un travail considérable. J’avoue que je ne comprends pas comment elle a fait pour tenir debout tout ce temps, cela demande une volonté et une force de vie incroyables.
J’ai trouvé ce livre fascinant, dès le départ. De voir les premières manifestations paranormales, interprétées comme des coups de fatigue et hallucinations, au réveil progressif du château… fascinant est bien le mot.
“Il était désormais un monde que je ne connaissais pas, que je n’avais pas compris et dont on m’avait caché l’essentiel : nos sens ne percevaient qu’une infime partie de tout. Voir pour croire était une hérésie. Il fallait compter avec l’invisible.”
J’ai été très étonnée de lire le harcèlement par courrier qu’ils ont pu avoir.. des dizaines de lettres, certaines farfelues, d’autres pour leur conseiller de fuir, d’autres proposant leur aide pour se débarrasser de ces entités. Je ne m’imaginais pas qu’il puisse y avoir eu un tel déferlement de haine (je ne vois pas d’autre mot) vis-à-vis de Véronique et sa famille…
D’autres, peut-être potentiellement plus bienveillants, lui disaient de se débarrasser au plus vite du château, qu’il ne lui apporterait rien de bon…
“Beaucoup de gens me conseillaient de revendre ou de casser la vente, mais en France, la hantise n’est pas un vice caché (aux États-Unis, c’est un motif d’annulation de la vente). Pour que ce soit un vice caché, il fallait déjà donner aux invisibles une once de réalité, puis oser une existence juridique. Nous en étions loin.”
A force d’évènements étranges voire malsains qui s’y sont déroulés depuis que Véronique a entrepris la rénovation, Fougeret a bien failli avoir un destin bien différent de celui que nous connaissons actuellement. On ne parle pas de simples objets qui se déplacent, ou de bruits de portes… On parle de “possessions”, de maladie, de décès…
“J’avais l’impression d’avoir acheté Amytiville avant le massacre de la famille qui l’occupait.”
Pour ceux qui n’y croient pas ce soit au mieux des coïncidences, au pire des affabulations de personnes bonnes à enfermer. Sauf que quand il y a de réelles conséquences de ces évènements, il est difficile, si ce n’est d’y croire, d’y trouver une explication rationnelle, comme le décès de leur neveu ou la maladie de la fille du couple.
Dans une des lettres reçues au début, une lettre avait plus particulièrement attiré son attention. Cette lettre parlait du fait que Fougeret était une entité menaçante, et qu’à chaque génération, elle réclamait son dû… Qu’à chaque génération, elle emportait dans la mort une personne, jeune, de préférence. cette “malédiction” semble bien s’y être accomplie, au final… je trouve ça troublant, que ce soit une simple coïncidence ou un réel dessein des lieux.
S’il y a cependant bien un côté que j’apprécie un peu moins dans l’exploitation du château, c’est que pour moi, certaines choses ont été prises à la légère. J’en veux pour preuve les séances de tables tournantes qui ont été organisées comme une « animation touristique »,… j’ai beaucoup de mal avec ça.
“Faire tourner les tables était devenu notre spécialité. En toute modestie, nous avons relancé cette façon de communiquer en France. Au début, nous faisions plus d’expériences que de réelles communications. Les séances de table tournante se pratiquaient avec des trépieds ou des guéridons de quelques kilogrammes. De plus, les trois pieds aidaient considérablement la perte d’équilibre sur laquelle les invisibles s’appuyaient pour, d’un soubresaut, léviter ou courir. Cela nous a été reproché. La légèreté était notre ennemie. L’effet idéomoteur également. Cette théorie prétendait que nous lancions des contractions inconscientes des muscles de nos doigts qui faisaient bouger la table et qu’ainsi nous obtenions des réponses cohérentes puisque nous les connaissions à l’avance. Cette hypothèse ne tarderait pas à être totalement démentie par nos expériences, mais je ne revendiquerais jamais rien. Nous avons préféré continuer. Nous étions comme des enfants et nous faisions des heureux. L’essentiel était là. Le reste était superflu.”
La manière dont cela se déroulait – selon le livre bien entendu – donne une impression de légèreté, de rigolade, que les esprits étaient une attraction plus qu’autre chose… Je trouve ça un peu irrespectueux, même si je peux comprendre la volonté de redorer un peu le blason du château et lui donner un aspect moins dramatique.
J’ai trouvé “amusant” le profil type des “enquêteurs paranormaux” qu’elle met en évidence.. en y regardant bien, la grande majorité des chaînes du genre que je regarde entrent bien dans cette description, sauf pour le fait des tatouages…
“Car il se dégage, réellement, un profil type de l’enquêteur / amateur en paranormal. Trentenaires, voire quarantenaires en moyenne, plutôt hipsters, tatoués, souvent fans de matériel électronique, ils connaissent par coeur tous les lieux hantés et n’ont qu’une idée : se démarquer en trouvant une preuve incontestable ou en débunkant un fake.[…] En bref, certains sont devenus des amis, mais beaucoup d’entre eux m’ont autant intéressée que l’apprentissage des tables de multiplication.”
Elle y explique aussi que les visiteurs, qu’ils soient “chasseurs de fantômes” ou simple lambda, étaient déçus quand rien ne se passaient… mais les gens sont tellement contradictoires.. d’un côté, ils viennent plein de scepticisme, prêts à crier au fake, sachant pertinemment bien au fond d’eux-mêmes qu’il ne se passera rien… et quand effectivement, la nuit est calme, ils sont déçus, ça ne répond pas à leurs attentes…. Mais les entités sont “des personnes”, et pas une attraction… elles ne sont pas là pour servir les désirs de sensations fortes des visiteurs… trop peu y pensent.
Finalement, ce livre m’a encore plus fascinée que je ne l’aurais pensé. Il ne se contente pas d’énoncer les phénomènes paranormaux qui ont – supposément – eu lieu à Fougeret… Il nous en raconte toute l’histoire, le passé, le présent, ses habitants, vivants ou esprits.
Il nous raconte aussi l’impact que ce château a eu sur la vie de Véronique et sa famille, et contrairement à ce que l’on pourrait croire, à ce que certains semblent croire, ce n’est pas une vie en rose bonbon… Car outre le coût financier derrière les rénovations, ce château leur a coûté bien plus que ça.
Si vous vous intéressez un tant soit peu au sujet, je vous le conseille sans hésiter.
Après la lecture de ce livre, j’aurais tellement envie de m’asseoir sur un banc, au milieu du parc de Fougeret, avec elle, et l’écouter de parler de Fougeret avec une telle fougue, une telle passion…
Il y a une phrase que j’ai beaucoup aimée dans le livre… Je vous la mettrai en conclusion de cette chronique…
Il me le faut !
Je suis certaine de psychoter à chaque bruit après l’avoir lu, parce que je fais partie des sceptiques peureuses, mais ça a l’air fascinant.
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