Oslav, de Emilie Maïsterrena

Une famille dysfonctionnelle, fragilisée par un accident qui n’aurait jamais dû avoir lieu, est emprisonnée dans un piège où un miracle deviendra rapidement la pire des malédictions.

***

Entre le passé trouble aux blessures encore béantes d’une jeune femme, un amour inconditionnel, une entité protectrice et les confessions intimes d’une vieille dame cachant en elle un lourd secret, vous découvrirez pourquoi une mère s’enfonce dans la folie la plus cruelle.

• • • • •

Les Éditions Cauchemars Airlines
Collection Vol 218
186 pages | 3 décembre 2020
Note personnelle : ★ ★ ★ ☆ ☆

• • • • •

Je cherchais un livre qui sorte de l’ordinaire, … un livre qui ne fait pas nécessairement un boom médiatique, mais qui puisse me surprendre.
Mon choix s’est porté sur Oslav, que j’ai découvert un peu par hasard sur Amazon. Ce qui a engagé mon choix, c’est le fait qu’on parle de malédiction, de folie, … ça a aiguisé ma curiosité.

Pour voir l’avis en vidéo…

« La mort occupe une place importante dans chacune de nos vies. Pour certaines personnes, elle est synonyme de délivrance, pour d’autres, d’un chemin de traverse, d’un passage obligatoire à vivre ou à subir. Pour une petite partie de la population, elle se rapporte à la thanatophobie, nom hideux pour désigner cette peur de mourir. Comme sa cousine, l’arachnophobie, elle est incontrôlable. Dans la majorité des cas, cet épisode de stress – et le mot est faible – est provoqué par un évènement traumatisant tel que la vision d’un cadavre lors de funérailles ou d’un accident. La majorité des cas serait diagnostiquée vers sept ou huit ans, ce qui nous laisse croire que la thanatophobie déclencherait le fonctionnement de son engrenage très tôt, à la petite enfance. « 

L’auteure commence son livre par nous mettre en conditions : dans son introduction, elle nous explique que les personnes ayant une peur panique de la mort, c’est souvent consécutif à un traumatisme qui aurait eu lieu dans l’enfance, vers les 8 ans.
Elle nous rappelle aussi que la vie est incertaine, qu’à tout moment, la mort peut venir nous faucher et nous prendre par surprise.
Ça donne un peu le ton, vous ne trouvez pas?

C’est une passage criant de vérité qui fait beaucoup réfléchir – je trouve – :

« La mort vous suit, vous traque pas à pas. » Pour ma part en tous cas, il  résonne pas mal en moi. La mort peut frapper à tout moment, nous n’y pensons pas assez. Je ne dis pas que cela doit devenir une obsession, loin de là… Il ne faut pas y penser dans le sens d’en avoir peur de vivre, mais au contraire, d’être reconnaissant d’être en vie, d’avoir de la reconnaissance pour cela.

Et la meilleure manière d’en être reconnaissant, c’est de la respecter, et d’en profiter… de la vivre pleinement tant que cette chance nous en est donné… y compris dans le fait de profiter de chaque instant avec les personnes qui nous sont chère, mais là, je m’égare.

On se retrouve face à un récit aux multiples narrateurs et points de vue… et ça, vous savez que j’apprécie beaucoup.
On a d’un côté Olga Meszaros, une Hongroise âgée de 95 ans, une vieille dame qui nous raconte son passé et nous distille des informations sur, finalement, l’origine de l’histoire qui nous intéresse.
On a la vision des personnages principaux…
On a cette alternance qui coupe un peu le rythme de l’histoire, avec les retours dans le passé… et je trouve que le récit n’en avait pas nécessairement besoin.

L’écriture est simple mais efficace. On commence par un extrait de journal intime, et j’aime beaucoup ce format. Je trouve ça intimiste, lire les pensées secrètes d’une personne, … c’est toujours un peu grisant. Ça donne une impression d’importance au lecteur, de privilège. Ça permet aussi de connaître des détails « de la plume même » de la personne qui a vécu certains faits, ça nous rapproche un peu d’elle.
Le français québécois n’est pas un soucis, car bien que certains termes m’ont parfois fait sourire, et m’ont surprise, ce n’est en rien dérangeant dans la lecture.

Point de vue de la forme du livre, je ne sais pas s’il en est de même dans la version papier, mais dans la version numérique, certains caractères ne sont pas correctement affichés, comme le numéro de l’arrondissement qui aurait dû être en majuscules. C’est un détail et il peut être facilement corrigé, par contre.

« Un incendie mortel s’est déclaré dans un immeuble à logements situé dans le xvie arrondissement parisien, dans la nuit du 4 au 5 février. »

J’ai aimé qu’il y ait des références, notamment à mon auteur préféré, …

« Été 2016
Parce que parfois, il y a pire que la mort. Stephen King (Simetierre) »

On retrouve d’ailleurs plusieurs références à l’auteur tout au long du roman, ainsi qu’à d’autres qui sont sans nul doute parmi les préférences de l’auteure, et qui ont probablement dirigé ses choix d’écriture vers l’horreur et le paranormal.

« De chaque côté de l’habitacle, de grandes bibliothèques conservaient tous les ouvrages de ses auteurs préférés passant de Lovecraft à Poe, puis de Stephen King à son fils Joe Hill. Une section était dédiée à Clive Barker et ses livres de sang et une autre section à une collection inédite de contes interdits écrits par des auteurs québécois. »

Et pourtant, ce principe de références m’a vite tapé sur le système… faire des clins d’œil, c’est bien, mais quand cela devient redondant, c’est lassant voire lourd. Par rapport au livre et la longueur de l’histoire, il y a beaucoup – mais vraiment beaucoup- trop de références….

Par rapport à Yvan Godbout, c’est à se demander si l’auteur mis en avant encore et encore n’a pas payé l’auteure du roman pour lui faire sa pub…
J’avoue qu’au bout d’un moment, j’ai trouvé ça franchement dérangeant et énervant.

« Béa était probablement assise sur les marches de l’escalier en train de discuter avec coco lapin, version conte interdit. » […]
« Sarah était allongée sur son divan, le dernier livre d’Yvan Godbout à la main. Deux jours auparavant, elle avait trouvé ce roman dans la bibliothèque de son mari et déjà, elle le refermait définitivement. »
« — Tu l’as déjà terminé? demanda-t-il en apercevant le conte interdit sur le meuble. »
Oui et il était très bon. Un auteur talentueux. C’est tout ce que je peux dire, soupira Sarah, loin dans ses pensées. — Je l’aime bien aussi! Croisons simplement les doigts pour que cette histoire exubérante de procès prenne fin rapidement… Personne ne s’en rend compte, mais c’est l’avenir des auteurs de tout le Québec qui est en jeu! »
« Jean-Félix déposa sa tasse de café, mais à distance du roman puisqu’il ne se pardonnerait pas un accident avec son précieux Boucle d’Or. »

Ces différentes références viennent de différents endroits du livre… elle veut vraiment enfoncer le clou…
Je suis d’accord que l’auteure a voulu y faire passer un message et ses convictions, mais je pense que ce n’est pas la bonne façon. Cela manquait clairement de subtilité, ça n’avait rien à faire dans l’histoire, et ça vient plus la desservir qu’autre chose : une personne qui lit le livre et ne sait pas de quoi il s’agit sera plus perdue qu’autre chose… J’avais suivi l’histoire autour du livre incriminé, et je connais la collection dont il fait partie, mais pour une personne lambda qui n’a rien suivi, qui ne sait rien du procès, du pourquoi du comment, c’est un peu comme lire un livre et se dire qu’on a raté quelque chose, comme lire un second tome sans avoir lu le premier et ne rien comprendre aux références citées. Ça crée juste de la frustration.

Ce n’était, je trouve, pas l’endroit pour aller faire ce genre de référence et de « propagande »

Point de vue des personnages… contre toute attente, j’ai beaucoup aimé le personnage de Sarah… une femme qui s’efforce d’être une bonne épouse et une bonne mère malgré ses doutes, qui se bat pour se surpasser, pour battre ses propres démons pour le bien de sa famille.

« Lorsque Béatrice était née, Sarah s’était mise à douter de ses capacités maternelles. »

Par contre, qu’est ce que j’ai ressenti de l’antipathie pour son mari : il est décrit comme un macho, et une phrase en particulier m’a fait bondir :

« Il travaillait dur toute la journée, parfois même très tard le soir pour… pourquoi? Pour la voir bouder à son arrivée? Non. La moindre des choses qu’il espérait, qu’il exigeait de Sarah, c’était qu’elle soit de bonne humeur à son retour à la maison et tandis qu’il contrôlait son envie de l’envoyer promener, il s’imagina remonter dans la voiture, ne laissant, comme seule explication, qu’un crissement de pneus dans l’entrée asphaltée de leur résidence. »

En gros, je vais bosser, je ramène l’argent, soit belle, souris, et tais-toi ! Ouch !
Me concernant, ça a directement jeté un froid polaire vis-à-vis de lui, et durant tout le livre, je n’ai pu m’ôter cette sensation.
Clairement, ils n’ont rien d’un couple heureux. Ça m’a rendue triste pour Sarah et a renforcé mon empathie pour elle. Du moins au début… Et puis au bout d’un moment, le côté  hyper culpabilisant et angoissant de Sarah a commencé à me taper sur les nerfs. Elle est devenue une mère étouffante avec son enfant… On a juste envie de la secouer un bon coup.

J’ai malgré tout eu un peu de mal à entrer dans le livre… je voyais mal où l’auteur voulait en venir, je n’arrivais pas à faire le lien entre Olga et Sarah, … je me demandais si j’allais accrocher.
Puis tout d’un coup, je ne sais pas suite à quoi, j’ai été happée par le livre et  je n’avais qu’une envie, continuer ma lecture pour en savoir plus.

J’ai trouvé cependant quelques comparaisons un peu trop exagérées et inutilement tournées vers l’horreur. Elles en faisaient un peu trop que pour être agréables à la lecture, selon moi… ça rendait, par moment, le texte un peu lourd … j’apprécie un peu plus de simplicité dans l’écriture.

« L’accident de Béatrice, songeait-il, avait fait naître dans leur estomac un nid de larves qui roulaient et ondulaient entre elles, dévorant chaque parcelle de leur membrane muqueuse et s’ils ne prenaient pas l’initiative bientôt de parler de leurs émotions, les petits asticots blancs qu’ils avaient créés continueraient de croître et de se multiplier. »

Au plus j’avançais dans l’histoire, et moins j’ai trouvé le récit crédible… Je suis une habituée du surnaturel et des films d’horreur, également pour ce genre de littérature, mais là, ça ne l’a pas fait, la sauce n’a pas pris.
J’ai vraiment eu un intérêt en dent de scie pour le livre, entre les passages qui me motivaient, et ceux qui m’exaspéraient.

Difficile de vous parler du sujet central sans vous spoiler, mais je vais essayer.
J’avoue que plus j’avançais dans le livre, et plus j’avais l’impression de me retrouver devant un schéma classique de film d’épouvante sur cette thématique… donc rien ne m’a époustouflée.

Alors ne pensez pas que l’histoire n’est pas intéressante et n’est pas bien, loin de là, … J’ai apprécié la lecture et c’était sympa, mais rien de suffisamment novateur pour me marquer sur du long terme, je pense.

Après, le fait que j’enchaîne les films du genre n’y est sans doute pas pour rien et une personne plus lambda, novice dans le domaine ou n’ayant pas mon passif cinématographique sera sans nul doute plus enthousiaste que moi. Je n’en doute pas.

Une chose que j’ai adorée : une version post-finale de l’histoire, racontée par un narrateur peu ordinaire.

En résumé, je dirais que c’est une histoire intéressante pour sa globalité, pas novatrice mais qui ne manquera pas de faire frissonner les personnes peu habituées au genre.
Dommage pour l’exagération dans les références qui n’ont pas leur place dans le roman, je trouve, et ont eu tendance à me saouler un peu…

Une référence musicale du livre que je ne peux que vous mettre, car j’adore cette chanson : Behind blue eyes, du groupe Limp Bizkit.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s