La Malédiction de Sarah Winchester – La contre enquête, de  Céline du Chéné

1886, San Jose, Californie. Une riche veuve solitaire et recluse. Une demeure labyrinthique, en éternelle expansion. Des portes qui ouvrent sur des murs et des escaliers qui butent sur des plafonds. L’ombre des massacres perpétrés par les carabines Winchester. Et une rumeur qui enfle… la maison serait hantée et sa propriétaire, maudite ! Dans cette enquête où se croisent esprits vengeurs, bâtisseurs de l’étrange, génocide amérindien et presse de caniveau, Céline du Chéné démêle le vrai du faux. Elle nous entraîne dans les pas de Sarah Winchester, une femme fascinante, et révèle une vérité qui dépasse la fiction.

On ne va pas se mentir, l’histoire de cette maison, que ce soit son apparence, sa réelle histoire, ou tous les mythes qui ont été construits autour d’elle, me fascine. 
Pour ceux qui ont vu le film, cela me fait beaucoup penser à l’histoire d’Ellen Rimbauer, que l’on peut retrouver dans le livre (et le film) Le journal d’Ellen Rimbauer  et de Rose Red, le film réalisé par Stephen King.

Pour ceux qui n’auraient jamais entendu parler de la maison Winchester, voici une petite description:

“L’historienne me précise que cette demeure, qui existe toujours, a été construite par une veuve richissime née sur la côte est du pays. Cette femme, Sarah Winchester (1839-1922), aurait passé trente-huit ans de son existence à faire bâtir, 24 heures sur 24, une habitation labyrinthique qui va « enfler de pièce en pièce » jusqu’à en comporter, selon certaines sources, plus de cinq cents, sur sept étages, avec des escaliers qui ne mènent nulle part ou des portes qui s’ouvrent sur des murs…”

Sarah Winchester est une femme qui a beaucoup intrigué : elle aurait été spirite aurait eu de nombreuses communications avec l’au-delà… Femme du propriétaire de la fabrique d’armes à feu Winchester, la “légende” raconte que sa maison aurait été construite dans le but de permettre de capturer les esprits des personnes décédées avec une de ces armes, et qui revenaient pour la “hanter”, et que c’était là la malédiction qui frappait la veuve Winchester.
Je vous avoue que c’est une histoire qui m’intéresse depuis des années.

***

En ce qui concerne le fond… j’ai trouvé ce livre fascinant, car il foisonne d’informations . Il aborde bien les différents aspects que ce soit la vie de Madame Winchester, son histoire, l’achat de la maison, sa transformation, …

On y retrouve aussi le descriptif de différents grands événements de l’époque, que ce soit du point de vue économique, ou encore météorologique ou des catastrophes naturelles.
On peut voir le travail de recherche énorme qu’il y a derrière cet ouvrage. C’est quelque chose de très appréciable, car ce ne sont pas – comme pour un livre que je vous ai présenté dernièrement – de simples copiés-collés du net.

Et pourtant, ce n’est pas chose facile. Car bien qu’il y ait de nombreux sites et ouvrages qui relatent à leur manière l’histoire de Sarah Winchester, il n’existe en réalité que très peu, voire pas du tout, de documents officiels de l’époque de son vivant.
Il n’a été retrouvé ni lettres, ni journaux intimes,  ni interviews écrites.
Dès lors, chacun y va un peu de sa propre griffe pour raconter cette histoire.. et c’est parfois difficile de démêler le vrai du faux, puisque tout tient à des témoignages oraux et des suppositions.

La première partie du livre raconte l’histoire de Sarah et celle de son mari, comment il en est venu à vendre des armes, la perte de leur unique enfant… On découvre aussi pourquoi, à la mort de son mari, Sarah décide de faire construire une maison, et pourquoi les travaux ne s’arrêteront qu’à sa mort.

« Construite sur une période de trente-huit ans parce que sa propriétaire, Sarah Winchester, pensait qu’elle vivrait aussi longtemps que la construction durerait, la maison contient 160 pièces et couvre plus de deux hectares. Parmi les 40 escaliers et 2 000 portes que comporte la demeure, certains ne mènent nulle part. »

Elle évoque aussi les tendances et habitudes de l’époque, l’attrait pour le peuple amérindien, et celui pour le spiritisme.
Le livre revient aussi sur les dangers du spiritisme, ses enjeux, … ce qu’il est important de faire ou ne pas faire si l’on veut s’y adonner, … Par contre, je trouve que venir donner le nom de “doctrine spirite” à ceux qui croient au paranormal… je ne suis pas trop d’accord, je trouve le terme un peu fort et péjoratif, surtout, mais là, c’est mon avis personnel.

La seconde partie est plus axée sur l’évolution de la maison et ses transformations au fil du temps.

Le dernier tiers du livre sert un peu de débunkage. Qu’est-ce qui, dans le flot d’informations disponibles, nous permet de voir le vrai du faux dans ce halo de mystère qui entoure la maison.

On y découvre notamment une Sarah Winchester totalement différente de ce portrait lugubre et mystérieux ou mystique que l’on peut souvent en dépeindre. Une femme libre qui défie les règles sociétales de son époque en partant pour se créer une nouvelle vie loin de sa famille… une femme qui dirige sa vie comme elle l’entendait, ce qui ne se faisait pas trop à l’époque. Une femme généreuse, curieuse, qui vivait avec son temps et adorait tester de nouvelles choses. Une femme soucieuse de son personnel, de leur bien être et de celui de leur famille.

Sur la forme, ce livre est très bien écrit.

J’ai adoré le côté document agrémenté de photos, certes peu nombreuses, mais utilisées à bon escient… c’est quelque chose qui rend le récit plus agréable à lire, plus vivant, plus marquant.

L’écriture est agréable à lire, elle rend l’ouvrage “facile” à lire, c’est à dire qu’on ne se prend pas une migraine au bout de deux pages tellement le style est imbuvable. Ici, c’est limpide et agréable.

Si je devais trouver un point négatif, malgré tout, c’est que dès le début, beaucoup d’informations théoriques nous sont données… Je pense qu’en les distillant au fil du livre, ça aurait moins donné l’impression d’un “gros pavé” qui pourrait en rebuter certains.
Après, en soi, les informations sont intéressantes, qu’on y croie ou pas. A chacun de faire le tri dans ce qui est mis à notre disposition.

Cela nous montre aussi comment déjà à l’époque, la presse pouvait modifier la vérité pour faire d’un fait banal une histoire sordide et totalement fausse.

J’ai aimé que cela aille plus loin que la simple histoire Winchester, en abordant le contexte financier et politique de l’Amérique de l’époque, comme la loi anti-chinois leur interdisant d’acquérir la nationalité américaine. Je ne connaissais absolument pas cette loi, et ça m’a donné envie de creuser un peu le sujet.

“En quittant la Winchester Mystery House, on ne peut que s’interroger : que vient-on, au juste, de visiter ? La demeure conçue par Sarah Winchester ou une attraction touristique installée dans un monument historique ? Question à laquelle il est difficile de répondre puisque, dans cette habitation gigantesque, on ignore ce qui reste vraiment du projet de sa propriétaire. Malgré tout subsiste une réelle impression d’étrangeté. Était-ce déjà le cas il y a cent ans ? Cette maison ressemble-t-elle aux maisons hantées de son époque ? “

C’est effectivement une question qui m’interpelle… quelle est la part d’authenticité encore présente dans cette maison? Qu’elle est la part réelle de ce qu’elle était, avant de devenir un lieu touristique?

En conclusion, je ne peux évidemment pas vous raconter tout l’historique de la maison et comment elle en est venue à avoir cette réputation de maison la plus hantée des Etats-Unis… mais si comme moi, vous aimez en apprendre un peu plus sur l’histoire des lieux, et que vous aimez le paranormal, vous aimerez certainement ce livre.

Personnellement, j’ai beaucoup aimé cette lecture, et le fait que même si c’est centré sur la maison Winchester et son histoire, cela aborde aussi des lieux similaires, ou nous parle de l’histoire des personnes ayant fréquenté ce lieu. Cela en fait un ouvrage assez complet sur le sujet.

Pour aller plus loin :

La Maison Winchester, de Max Cabanes et Marie-Charlotte Delmas (Glénat, 2004),

Si vous avez envie de voir à quoi ressemble la maison à présent, je vous conseille la vidéo du GrandJD 

Et si vous êtes cinéphile, n’hésitez pas à regarder également le film d’épouvante La malédiction Winchester, si le coeur vous en dit.

 

3 commentaires sur « La Malédiction de Sarah Winchester – La contre enquête, de  Céline du Chéné »

    1. Ah zut… dans aucune ? (je ne sais pas si ça marche comme ça chez vous, mais ici dans les bibliothèques de ma région, elles sont toutes « reliées entre elles », et on peut commander d’une à l’autre… c’est juste qu’on ne peut pas prolonger le temps d’emprunt, mais pour un livre, 15 jours ça va.

      J’aime

      1. Pareil ici, c’est un réseau d’une quinzaine de médiathèques et aucune n’a ce livre… Trop pointu, trop niche ? Par contre, on peut emprunter les livres pendant 4 semaines et prolonger le prêt. Bonne semaine 🙂

        J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s